jeudi 1 février 2024

Luis Viale et le naufrage du bateau à aubes à vapeur América le dimanche 24 décembre 1871...

Le bateau à aubes à vapeur América fit naufrage le dimanche 24 décembre 1871. Le nombre de personnes qui perdirent la vie varie sur Internet d’un site à l’autre ; d’une quarantaine à près de cent cinquante !? Ce fut l'une des plus grandes tragédies fluviales survenues en Argentine. Ce véritable palais flottant, acheté par Bartolomé Bossi et deux associés pour une somme de vingt-cinq mille pesos de l’époque,  fut construit au chantier naval Mc Kay à Aldrey à Boston aux États-Unis. Lancé sur les flots, il arriva au port de Buenos Aires en septembre 1868. Alliant luxe et confort, le bateau à aubes fut rapidement le favori des Porteños et des Uruguayens.

Le jour du naufrage, le samedi 23 décembre 1871, le bateau à vapeur quitta le port de Buenos Aires à dix-huit heures avec deux cent huit passagers à son bord dont d’illustres personnages tel Lisandro, le fils aîné de Mariano Billinghurst, un homme d’affaires argentin qui fit fortune avec les tramways et les chemins de fer. Étaient également présents à bord, Alejo Arocena, président de la Banque de la province de Buenos Aires, et ses deux neveux, Pelayo et Ramón, dont les parents venaient de mourir durant une épidémie de fièvre jaune. Quant à Luis Viale, un marchand italien, l'un des fondateurs de l'hôpital italien de Buenos Aires, il monta à bord de l'América alors qu’il avait prévu de voyager sur le bateau la Villa del Salto. La rencontre fortuite de son ami Don Juan Martín, accompagné du  Dr Ignacio Gómez, modifia ses plans et sa ligne de vie.

Peu après minuit, alors que la majorité des passagers dormaient dans leur cabine après un copieux dîner, à la grande satisfaction du commandant Bartolomé Bossi, l'América continuait de naviguer à grande vitesse dans le dessein de rattraper le Villa del Salto, partie une heure plus tôt ; John Morse, son commandant devait probablement ignorer son rôle. La folie de l’ego serait à l’origine du naufrage. Bartolomé voulait arriver à Montevideo avant son rival imaginé. Les chaudières surchauffèrent et le commandant refusa de diminuer la pression. À une heure trente du matin, alors que le bateau se trouvait à vingt-cinq milles des côtes uruguayennes, une forte explosion se fit entendre dans la salle des machines. Le commandant sous-estima la gravité de la situation et continua la navigation, au grand dam de certains passagers qui l’avaient mis en garde des risques importants encourus. Un incendie se déclara alors dans la salle des machines, se propagea rapidement sur le pont en mettant le feu aux canots de sauvetage. La panique s’empara des passagers et rares furent ceux qui, au milieu de l’affolement général, réussirent à aller chercher leur gilet de sauvetage dans leur cabine. Contre toute attente, le capitaine Bossi (qui trépassera à Nice en 1890) et une partie de l’équipage sautèrent à l'eau avec leur gilet de sauvetage en laissant les passagers à leur sort. Seuls ceux qui réussirent à mettre leur gilet de sauvetage et à le garder, car une foire d’empoigne meurtrière sévissait à bord, furent sauvés.

Luis Viale, dans les flots, quitta et donna son gilet de sauvetage à Carmen Pinedo Quesada, la nièce du ministre Federico Pinedo, qui était enceinte. Son mari Augusto Marcó del Pont et Luis se noyèrent devant Carmen, engloutis par les vagues, quand leurs dernières forces les abandonnèrent. John Morse, le commandant du bateau Villa del Salto, qui avait vu l’incendie au loin, avait fait machine arrière pour venir en aide aux survivants. Il peina à trouver la position exacte du naufrage, car le bateau avait sombré bien avant son arrivée. Carmen, en état de choc, fut secourue par des membres d’équipage du Villa del Salto. Après son sauvetage, elle resta à Montevideo pendant quelques mois pour recouvrer sa santé physique et psychique. Elle retourna ensuite à Buenos Aires où elle donna naissance à sa fille Sissy.

Ramón et Pelayo moururent carbonisés. Un autre passager, Ramón Artagaveytia, parvint  à atteindre à la nage la côte uruguayenne. Une quarantaine d’années plus tard, il mourra dans le naufrage du paquebot… Titanic !         Quant à Luis Viale, le journal La Nación, dans son édition du lundi 30 décembre 1872, lança un appel à une collecte afin de récolter des fonds pour réaliser le monument à sa mémoire que nous avons découvert dans la pergola de la Reserva Ecológica…

Seule la mémoire cosmique connaît les faits exacts, qui remontent à plus de cent cinquante ans, ayant conduit au naufrage. Mon récit est à prendre au conditionnel ; il peut être empreint d'inexactitudes et d'incohérences. Sa narration résulte de mes choix et de mes inclinations dans mes recherches. Le capitaine Bossi est-il vraiment le responsable de ce drame des mers ? les circonstances relatées sur Internet se contredisent souvent. Les témoignages des humains sont peu fiables et transitent par le filtre de leur perception, de leurs croyances et de leur mémoire… et les témoignages des médias peuvent être manipulés, car les intérêts des humains qui les animent varient...

Bateau à aubes à vapeur América

Bateau la Villa del Salto






Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

André et Patrick auront plaisir à lire vos impressions sur le blog...