Le petit déjeuner de l’hôtel Ibis, contre toute attente, se montre diversifié. De la compote de pommes, des tranches de pamplemousse, des dattes, des cerneaux de noix, une madeleine, une petite crêpe et des viennoiseries participent à la partition de ma collation. Yvanna nous accueille à la réception pour le départ. Les neuf heures passent. Quelques gouttes de pluie nous accompagnent durant le court trajet pour nous rendre à pied jusqu’à la gare de Lyon. Nous achetons les aliments du déjeuner chez Prêt dans l’enceinte de la gare. Moussa nous accueille à la caisse. Il pianote énergiquement sur l’écran tactile pour entrer les codes des aliments choisis. Nous traversons la longue galerie marchande pour nous rendre dans le hall deux. Je m’attarde en chemin devant les fresques qui embellissent le haut des murs de la galerie, au-dessus des commerces. Une dame gracile, habillée tout en noir, un bandana bleu et blanc noué autour de la tête, joue énergiquement au piano dans un des espaces d’attente. Nous allons nous installer dans la salle du Starbucks pour attendre notre train. Je joue au FreeCell.
Le moment venu, nous descendons l’escalier mécanique et nous marchons vers le quai numéro treize. Pour pouvoir accéder au quai, chaque passager est dans l’obligation de scanner un code QR pour ouvrir un portillon. Le temps d’ouverture est court et je m’y prends à deux fois pour passer avec les deux valises. Je rouspète en disant : « Un monde de fou ! ». Auparavant, l’accès était libre et les accompagnateurs pouvaient suivre les voyageurs au départ pour leur dire au revoir en agitant la main sur le quai quand le train s’éloignait. Le prétexte de la sécurité entraîne une perte de liberté ici et dans bien d’autres domaines de la vie courante. La France glisse lentement sur les rails du totalitarisme. Nous prenons places dans deux sièges du rang vingt-sept. Le train s’anime et commence à glisser sur les rails à 10:18. Les annonces habituelles se laissent entendre en français et en anglais. Les accompagnateurs sont invités à descendre du train alors qu’ils n’ont plus la possibilité de monter à bord. Un message automatique tombé en désuétude ; des mots d’une autre époque révolue. La voix de Michael, le conducteur du train, se laisse entendre. Ses propos, liés au bien-être des passagers, surprennent par leurs côtés inhabituels et insolites.
Je retourne dans l’univers de l’esprit de Anne Bonny. Le roulis du train accompagne le tangage du navire Queen Royal où je vogue avec la reine des pirates, grâce à la magie des mots, sur les mers du radeau terrestre qui tourne et gravite autour du Soleil dans l’infini de l’espace sidéral. Les pleurs de bébés dans le train font écho aux hurlées de souffrance des prisonniers torturés sur le Jewel, le navire prison de sa majesté le roi d’Angleterre, arraisonné par la reine des pirates pour libérer les prisonniers enchaînés. Les minutes gardent l’équilibre.
Midi sonne. Nous déjeunons dans le train. Bourg-en-Bresse s’éloigne. Bellegarde s’annonce. Le train entre en gare de Genève Cornavin à treize heures trente-cinq. Quarante minutes plus tard, nous arrivons par un autre train en gare d’Annemasse. Nous prenons un taxi pour nous rendre à Borly. Le chauffeur nous dépose à quatorze heures trente. Nous payons trente euros avec le pourboire. Le chauffeur est reconnaissant. Dans le garage, une fois la batterie connectée par Patrick, la Cuore démarre au quart de tour après dix mois d’inaction. Une heure plus tard environ, nous sommes à Annecy. Nous arrivons devant le portail de la résidence où nous allons séjourner. La chance opère dans les secondes suivantes quand une voiture arrive derrière nous et ouvre le portail. Nous stationnons la voiture sur l’emplacement vingt-huit qui nous est réservé pour la durée de notre séjour.
Les seize heures s’annoncent à l’arrivée de Igba, originaire du Kosovo, qui nous accueille et nous fait les honneurs de l’appartement, loué par Victor, situé au sixième étage. Nous commençons à nous installer. Depuis le balcon, la vue embrasse les montagnes, le château d’Annecy et le centre Courier où se trouve le Starbucks où nous allons nous désaltérer. La température est aussi élevée qu’à Paris et Anvers. Maïssane nous accueille.
Ainsi s’achève notre voyage de plus de dix mois de par le monde. Notre regard a changé au contact des populations et des pays que nous avons découvert… Nous avons butiné l’existence, comme Patrick l’a écrit dans un de ses poèmes. Gerard Nazunov a écrit : « En chaque être humain, le vent de la vie souffle dans des directions différentes. Jusqu’à son dernier souffle, tout un chacun a le pouvoir de choisir et de décider. »
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